William Bouguereau, La Soif (1886)
Il y a un vrai problème dans le dernier et par ailleurs remarquable livre d’Amélie Nothomb, cette autobiographe du Christ que celle-ci, en bonne potomane, a intitulée Soif, et qui, si l’on fait l’effort de la prendre au sérieux sur le plan théologique, n'est rien d'autre que celui du problème du christianisme depuis le début – à savoir la double nature de son fondateur. Se coltiner à ce paradoxe insensé, après le Concile de Chalcédoine (451) et tout ce qui a été écrit depuis, est la meilleure façon de le réactualiser et le revivifier. Et si l'Esprit Saint souffle où et sur qui il veut, alors pourquoi ne soufflerait-il pas sur l'autrice d'Antéchrista ? D'autant, et contrairement à ce qu’on a pu lire ici ou là, que le Christ "nothombien" n’est pas un Christ platement humain, "arien", soucieux de moral ou de social, pas du tout, c’est un Christ thaumaturge, capable de tous les miracles et même de ressusciter comme dans le dogme, mais qui semble avoir du mal avec sa divinité, son destin et son Père. Un Christ tout à fait divin quoiqu’encombré par sa divinité – et c’est cet encombrement divin qui définit son humanité et la nôtre. Car nous aussi sommes encombrés par le divin surtout si nous y croyons.
Désaltérons-nous, donc, en Soif.